Nous vous présentons les stagiaires et chercheuses associées au projet qui ont fait un travail énorme en coulisse : Nolwenn Marie Marconnet, Aline Desdevises et Leah Durst Lee. Elles présentent ici ce qu’elles ont appris et retenu du projet pour leurs futures carrières, maintenant qu’elles nous quittent et se tournent vers de nouveaux horizons. Nous leur souhaitons bonne chance.
Aline Desdevises, stagiaire à la EMiFo, étudiante en relations internationales à Sciences Po Rennes, France

Aline Desdevises, stagiaire à la EMiFo, étudiante en relations internationales à Sciences Po Rennes, France
J’ai rejoint le projet EMiFo en avril 2021 en tant que stagiaire, et j’ai participé à plusieurs activités du projet, en particulier l’atelier de Bamako en juillet 2021. Ce stage a vraiment renforcé mes compétences techniques et mon envie de continuer à travailler en lien avec la région ouest-africaine.
Avant tout, le fait de rejoindre le projet EMiFo m’a fait découvrir le phénomène de l’esclavage par ascendance. Je ne connaissais pas cette pratique auparavant, alors qu’elle persiste dans de nombreux pays d’Afrique de l’Ouest. Cette étude met en lumière la manière dont les pratiques passées perdurent et interagissent avec les nouvelles formes d’exploitation humaine, soulignant combien il est à la fois insuffisant de considérer l’esclavage comme étant uniquement « traditionnel » ou « moderne ».
Au-delà de l’expérience professionnelle acquise, travailler sur ce projet de recherche-action s’accompagne de réflexions sur les positions, les statuts, les privilèges… Travailler en études africaines, surtout sur des questions aussi sensibles, fait remonter à la surface les questions de racisme structurel, de discriminations de classe et de genre. À la différence du tabou qui entoure l’esclavage par ascendance, le fait de faire partie du projet EMiFo entraîne un questionnement explicite sur ce que représente le fait d’être une femme européenne blanche. J’ai eu la chance de participer à l’atelier de Bamako, et j’ai été confrontée à la question de la race et du genre ; par exemple, même dans le contexte de l’atelier, j’étais dans une situation privilégiée par rapport à mes collègues maliennes, ayant tendance à recevoir plus de considération de la part des participants même si j’étais plus bas dans la hiérarchie en tant que stagiaire.
Travailler dans l’équipe de EMiFo a confirmé et même accru mon intérêt pour les études africaines, comme ma volonté de m’impliquer dans des projets conscients et engagés.
Nolwenn Marconnet, chercheuse associée au projet EMiFO, Master d’études avancées sur la migration, Université de Copenhague, Danemark

Nolwenn Marconnet, stagiaire et chercheuse associée à EMiFo, Master d’études avancées sur la migration, Université de Copenhague, Danemark
J’ai été contactée par le Dr LottePelckmans en novembre 2020 pour faire partie du projet EMiFo et réaliser une ethnographie en ligne auprès d’un mouvement militant anti-esclavagiste basé à Paris, en France, que j’ai ensuite étudié dans ma mémoire de master. L’e-mail du Dr Pelckmans a été ma première introduction au concept d’esclavage par ascendance. Pendant mes années d’école en France, on m’a appris que l’esclavage était quelque chose qui appartenait au passé, lié au commerce triangulaire des esclaves, ou même à la Rome antique, et je me souviens avoir mémorisé que l’esclavage avait été aboli en France en 1848. Je ne me souviens pas qu’on m’ait enseigné ce qu’est l’esclavage par ascendance et j’ai été surprise d’apprendre que cette forme d’esclavage était perpétuée en France mais qu’elle n’était pas discutée publiquement. Je sais que je ne suis pas la seule à ne pas être sensibilisée à cette question et que de nombreux Européens, comme moi, ne connaissent que deux perspectives de l’esclavage : la traite triangulaire et ses séquelles, d’une part, et l’esclavage dit moderne, d’autre part. Grâce à mes entretiens avec des militants anti-esclavagistes, j’ai découvert ce qu’est l’esclavage par ascendance et comment il reste invisible dans la société. En tant qu’étudiante française blanche de la classe moyenne, assise dans ma chambre à Copenhague, j’avais l’étrange sentiment que mes informateurs et moi vivions dans deux mondes séparés qui ne pouvaient pas cohabiter, un sentiment accentué par mon incapacité à voyager et à rencontrer l’un d’entre eux en personne en raison de la pandémie de Covid-19. Je ne suis pas moi-même une survivante de la torture, de l’esclavage ou de toute autre forme d’exploitation physique et psychologique et je dois reconnaître que je n’en sais toujours pas autant que les nombreux militants qui m’ont offert un peu de leur temps.
En naviguant dans cette position compliquée et en reconnaissant mes propres privilèges, j’ai eu l’occasion d’écrire des articles de blog et d’organiser une conférence avec un militant malien, ce qui, je l’espère, a contribué à accroître la sensibilisation à l’esclavage par ascendance. Mais mon travail au sein du projet EMiFo/SlaFMig m’a probablement appris plus que ce que j’ai pu donner en retour, et mon souhait est de continuer à investir dans l’étude de l’esclavage par ascendance pour mieux donner une voix aux militants anti-esclavagistes et à leur combat pour l’égalité.
Leah Durst-Lee, chercheuse associée au projet EMiFO, diplômée du programme d’études avancées sur les migrations de l’Université de Copenhague, et actuellement étudiante en droit international et droits de l’homme à l’Université pour la paix des Nations unies, au Costa Rica.

Leah Durst-Lee, chargée de recherche à EMiFo, diplômée du programme d’études avancées sur les migrations de l’Université de Copenhague, et actuellement étudiante en droit international et droits de l’homme à l’Université pour la paix des Nations unies, au Costa Rica.
Ma participation en lien avec l’esclavage par ascendance a commencé en août 2020 lors d’un stage avec le Dr Lotte Pelckmans sur le projet EMiFo, et s’est poursuivie lors de mes recherches sur le potentiel d’une loi pénale anti-esclavagiste au Mali à affecter la pratique de l’esclavage par ascendance. Le temps que j’ai passé avec le EMiFo m’a donné l’occasion de comprendre comment, en tant qu’étudiante blanche d’origine européenne effectuant des recherches sur l’esclavage par ascendance en Afrique de l’Ouest, je me suis retrouvée confrontée à une dynamique de pouvoir postcolonial, culturel, racial et religieux vieille de plusieurs centaines d’années. Mes recherches avec le EMiFo m’ont permis de pratiquer une recherche décoloniale en privilégiant les voix et les connaissances locales par rapport aux miennes. Faire partie de l’équipe de recherche de EMiFo, qui se compose de chercheurs, d’universitaires et de praticiens internationaux et locaux, a été bénéfique pour apprendre et évoluer avec des partenaires en dehors de mon université d’origine, Copenhague.
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